mardi 8 mars 2011

Back ... again ... and again .. and again ...

Bonsoir à tous !

Oui je sais ce que vous allez tous me dire (d'aucuns me l'ont déjà dit au téléphone, voire même dans mon propre appartement) : Caedyrn, cher et ditingué ami, cela fait quand même fichtrement longtemps que vous n'usez plus votre plume sur ces belles pages que sont vos tranches de vie. Votre vie est-elle si pauvre en nouveautés que même cette friandise que vous nous servez s'en rassi ?

Eh bien comment dire ... C'est loin d'être le cas vous vous en doutez bien : Mes amis n'usent pas de ce langage soutenu et à vrai dire leurs propos sont même toujours orduriers et pauvres de sens. Je sais je pourrais en trouver d'autres, mais en côtoyant ceux ci je me sens mis en valeur.

Trêve de plaisanteries saupoudrées d'acide et de mauvaise foi, je m'excuse auprès d'eux. Qui aime bien châtie bien, tout le monde sait ça. Non ?

Cela dit il faut en effet que je me remettre au travail c'est certain et j'ai réussi à me dégager quelques moments de libre pour reprendre ces pérégrinations bloguesques. J'ai déjà entamé une correction des aventures d'Alvin (pas encore en ligne, mais j'ai bon espoir de finir cela avant ce week end) avant de vous présenter la suite de cette épopée. Au programme :

- Du sang
- Des larmes
- Des cris (de douleur)
- Un meilleur ami
- Le nom de l'inconnu enfin révélé
- Une femme mystérieuse ? Non, je n'ai pas envie de tomber dans ce cliché pour l'instant.
- Des ennemis redoutables et pourtant peu intelligents ? Non, j'ai la flemme d'écrire un combat pour l'instant.
- Trois chapitres par mois ? Non, faut pas déconner non plus, j'ai une réputation de glandeur à tenir moi ! Donc même si ils sont déjà écrits, j'attendrais avant de les poster !


Sur ce j'espère que tout va bien pour vous tous et que vous vous rappelez toujours que ce blog existe, quand même. Bonne soirée à tous et à une prochaine.

jeudi 27 janvier 2011

Lions, liant, lier ...

Bonjour à tous,

Je n'ai pas réellement le temps de faire d'énormes messages ces derniers temps ce qui change énormément en effet de la fin du mois de décembre, vous le voyez bien. J'espère que cette situation est vouée à évoluer dans les jours qui viennent, ou les semaines, peut être les mois mais au grand maximum dans l'année.

Cependant je peux quand même prendre quelques minutes aujourd'hui pour actualiser la rubrique Des fils, une toile ... avec deux nouveaux blogs à vous faire découvrir. Tout de suite le pourquoi du comment qu'ils se retrouvent ici.

Tout d'abord les Sales Histoires, blog collaboratif de Little Lilith et de Yörggle. C'est, enfin non cela va être, un autre blog BD comme je les affectionne particulièrement. Ces deux charmants loustics ont dans l'idée de créer une bande dessinée et d'en faire partager certains morceaux mais également la frénésie de la création aux internautes qui suivront leurs aventures. A noter que Rouge et moi-même n'arrêtons pas de les sermonner pour qu'ils se bougent les fesses ... Ca a l'air d'à peu près porter ses fruits mais nous avons besoin de votre aide à tous pour les motiver, tous à vos claviers et floodez le de commentaires pour qu'ils se pressent. Ca leur apprendra =P

Deuxième ajout aux liens, le blog cinéphile de Njer57, cordialement nommé Entre 2 films. Contrairement à ce que son titre et le pseudo de l'auteur peut laisser à penser nous ne sommes pas en présence d'un refuge de kikoolol tardifs. Si il n'est pas très régulier dans ses publications il n'en reste pas moins que ce cinéphile a toujours des critiques constructives et surtout regarde une grande variété de films, être franc et généraliste n'est pas contrairement à ce que l'on peut le penser a la portée de tout le monde.


Voilà, une note de liens en plus. Maintenant je vais aller vaquer à mes occupations tout en réflêchissant à la suite d'Alvin Crawford. Enfin, si je trouve le temps.

jeudi 13 janvier 2011

Soyons aigris ou doucereux ...

... Mais soyons le pour une bonne raison ! Oui je sais ce que vous vous dites, j'ai mis quelques jours avant de refaire une note, mais vu que je promettais d'en faire une moins longue il fallait que j'y passe plus de temps vous vous en doutez bien. Ainsi donc aujourd'hui vais-je parler de petites friandises à consommer sans modération quand il s'agit de passer le temps.

J'en entends déjà s'étonner que je parle de guimauves et autres gélatines sur mon cher blog et ils ont bien raison. Non je vais à la place parler de quelques petits ouvrages que j'appelle personnellement des friandises, qui ne nécessitent pas plus d'une demie-heure par passage ou par nouvelle et peuvent vous faire réfléchir durant une journée entière voire plus, commençons une liste non-exhaustive qui s'enrichira certainement par la suite.

Premièrement parlant d'une collection d'ouvrages de l'éditeur Albin Michel, nommée Spiritualités. Je ne fais pas l'apologie d'une quelconque philosophie ou religion, je nourris moi même mes avis de bien trop d'entre elles pour me le permettre. Cependant un peu de spiritualité n'a jamais fait de mal à personne, bien au contraire. Je retiens particulièrement les deux ouvrages suivants : L'art de la sieste et de la quiétude ainsi que les Contes de la chambre de thé.

Passons ensuite à un vieux livre, j'entends vieux en ce sens qu'il traîne depuis longtemps sur ma bilbiothèque, je me rappelle l'avoir étudié pour mon baccalauréat. Il m'avait alors particulièrement marqué et continue de le faire par sa justesse et ses réflexions toujours d'actualité. J'entends bien sur parler ici des Caractères de La Bruyère. Si la plume accuse ses trois cent ans plus que tassés, le message reste encore profondément d'actualité.

Troisième opus de ma petite sélection totalement non-exhaustive concernera un auteur dont j'ai déjà parlé ici, Neil Gaiman. Sachez que lorsque le Caedryn aime un auteur il vous en rabâchera souvent les oreilles, c'est normal et très sain il n'y a aucune obsession là dedans ... Ne me jugez pas. Donc nous parlons de Gaiman et de son receuil de nouvelles Miroirs & fumées.

Et enfin en dernière position nous allons pouvoir parler de Et si on refaisait l'histoire ? ouvrage universitaire écrit par Fabrice d'Almeida et Anthony Rowley. Certains ici voient très bien de quel livre je parle, il m'a été demandé de le compulser avant l'entrée en prépa Science-po. Extrêmement intéressant de par sa vocation uchronique, il revoit certaines grandes périodes de l'histoire sous l'angle du Et si ... ? Entre la victoire des sarrasins à poitiers, la victoire des Allemands à la fin d'octobre 1914 et tant d'autres tranches d'histoire revues et corrigées, il s'agit d'un exercice de style historique qui est proprement divertissant.

Sur ce, une petite note pour de petites friandises finie je peux enfin aller vaquer à mes occupations.

Bonne journée à tous et à une prochaine note.

dimanche 2 janvier 2011

Nouvelle année, (pas) toujours le même auteur ...

Comme il est de commune rigueur mutuelle de le faire en ces moments de fête, il m'incombe maintenant de vous souhaiter à tous une bonne année. Paraît-il que les convenances et l'étiquette imposent de se prêter à cet exercice que je commence à avoir du mal à prendre en compte. Non par misanthropisme pour une fois mais simplement parce que j'estime qu'il est plus qu'hypocrite de souhaiter une bonne année aux commerçants, guichetiers, fonctionnaires, citoyens, êtres humains en général que nous croisons tous les jours. Sincèrement n'est-il pas vrai que le fait que votre boulanger passe une bonne ou mauvaise année vous tient-il si chaud au coeur que ça ? Tant qu'il continue à faire son pain, c'est bien l'essentiel n'est ce pas ?

Il en va de même pour le premier fonctionnaire que vous rencontrerez en ce début d'année. Quoique à bien y réflêchir ce souhait d'une année bonne trouvera un écho intéressé en plus d'être hypocrite. Surtout ... ne pas fâcher un fonctionnaire, jamais, les procédures administratives sont toujours assez pénibles comme ça. Pas la peine d'en rajouter on a déjà bien assez de mal à remplir nos formulaires et à les faire valider sans se faire des ennemis au sein de l'administration.

Et parlons même de cette dernière partie des gens qui vous souhaitent bonne année dans la rue avec un grand sourire, comme si cette simple phrase et toute cette gentillesse contrefaite allait forcément vous attirer la baraka pour trois cent soixante quatre jours, treize heures et quarante sept secondes. Il m'arrive parfois d'imaginer ces gens là comme des prédateurs venimeux ... tapis dans l'ombre des poubelles municipales et attendant que vous accomplissiez votre devoir de recyclage. Quand vous sortez de chez vous pour aller aux poubelles, nanti d'un sublime syndrome céphalo-rectal post-réveillon du nouvel an (car si une convention peut se dénigrer, il ne faut jamais cracher sur un moment de fête et d'insouciance), le quidam venimeux et pétri de bonnes intentions vous assaille. Sans que vous ayez le temps de réagir il vous frappe et son poison malfaisant s'instille dans vos veines ... Bonne année, oui la douce promesse d'une année meilleure que la précédente alors qu'au fond peu de choses vont encore pouvoir changer.

Non pas que vous n'ayez aucune volonté, je ne me permettrais pas d'en juger, mais bien parce qu'au final on ne peut jamais aller plus vite que la musique et vous aurez forcément de mauvaises passes durant la nouvelle année. Peut être qu'oublier à tel point cette triste mais nécessaire réalité me laisse sans voix et sans réaction, ou bien peut être que je ne suis finalement qu'un misanthrope insensible et particulièrement grincheux. Cela je le laisse à votre appréciation mesdemoiselles, mesdames et messieurs.

Cependant j'aurais pour ma part passé un très agréable réveillon en compagnie de personnes me tenants particulièrement à coeur. J'aurais tellement voulu en voir d'autres également, mais ce n'était malheureusement pas possible, tants de voyages à faire pour cette année 2011 ... Pas de bonnes résolutions, sinon c'est comme avec le blog ... j'abandonnerais vite. Je ne suis pas un être de promesses sanctifiées et solennelles c'est certainement le plus utile bilan que je puisse tirer de l'année 2010. Cette nouvelle année se place donc sous le signe de la recherche : emploi, situation un peu moins précaire, permis de conduire ... Des moments de doute et d'angoisse plus que surement, de la joie et du bonheur sont à espérer en tout cas plus qu'en 2010. Mais au final la principale recherche qui m'attends en 2011 est, je pense, la recherche de moi-même une fois encore.

Je ne vous souhaite pas une bonne année vous vous en doutez, je vous souhaite juste de continuer de lutter pour ce qui vous est cher et de faire de votre vie ce que vous en entendez.

A très vite pour de nouvelles notes.

samedi 25 décembre 2010

Cadeau de Noël

Bonsoir à tous ! Comme vous vous en doutez mes promesses scriptoriales n'engageant que les abrutis qui y croient (donc ni vous ni moi), le défi de Noël était une idée irréalisable tant d'un point de vue physique que psychique. C'était les fêtes et je n'ai pas eu le temps de travailler là dessus, point barre.

Cependant dire que je compte abandonner l'histoire d'Alvin "Le pas chipmunk" Crawford est la mauvaise solution. Ce récit me semble porteur pour moi, aussi mon cadeau pour vous en cette fin d'année 2010 sera de continuer régulièrement cette histoire. Je vous en donnerais d'ailleurs la preuve avec la troisième partie qui suit ces quelques lignes.

Dernière chose, je ne sais pas à quelle cadence avancera ce récit, mais je n'ai pas non plus envie de ne poster que cela. Ainsi donc vais-je détendre mon esprit avec des articles moins longs dans les jours qui viennent. Et notamment une petite critique littéraire, parce que la critique c'est bon et qu'il est sain d'en manger.

Et maintenant, sans plus attendre, partie III d'Alvin Crawford

Et tant que j'y pense : Joyeux Noël à tous ^^

***

L'odeur corsée du café n'arrangeait rien aux pensées embrouillées d'Alvin en ce lendemain de faillite. Même si l'écroulement de sa fortune était pour l'instant le cadet de ses soucis au vu de ce réveil mouvementé. L'intrusion dans son appartement d'un inconnu aux manières aussi rudes que son accoutrement pouvait le laisser penser, le scellement de ses cordes vocales et surtout le fait de s'être réveillé en tant que torche humaine avait fini de réduire à néant les nerfs du dandy. L'homme avait fini par l'autoriser à utiliser ses cordes vocales, une fois qu'il avait été calmé et que les flammes avaient disparues. Ce qui surprit le plus Alvin lorsqu'il leva le sceau fut qu'il ne semblait pas utiliser d'artefact particulier pour ce pouvoir, il n'avait en effet fait que claquer des doigts et son prisonnier ressentit une sorte de tension dans la gorge, suivie de la possibilité d'utiliser sa voix. Bien entendu Alvin avait d'abord voulu harasser de questions son interlocuteur, qui claqua à nouveau des doigts pour bloquer à nouveau les cordes vocales avant de dire d'une voix amusée :

- Chut. C'est le matin donc on va d'abord prendre un café. Et ouvre la fenêtre, parce que ca pue le fauve dans ta chambre.

Sans vraiment se rendre compte de sa docilité il obéit en silence, se levant pour ouvrir la fenêtre et ainsi laisser s'échapper la fumée qui emplissait l'appartement. Connaissant la réputation du propriétaire en matière d'extravagances, personne parmi le voisinage ne verrait le problème à ce que celui-ci ait fait bruler une partie de son logement. Mais le fait qu'il ouvrit la fenêtre nu comme un ver, ses vêtements ayants accompagné le destin funeste du lit, pourrait faire décrier les gazettes durant des jours. Ayant peu envie d'être en tête d'affiche à nouveau, il bondit presque vers son armoire et y saisit quelques affaires avant de tourner la tête en direction de l'étranger. Une sorte de réflexe pudique assez ridicule au vu de la situation, surtout que l'homme n'était plus à sa place et que Alvin entendait du bruit dans sa cuisine, quelques mètres plus loin. Qui était ce type, comment avait-il put sceller sa voix avec une telle facilité … De nombreuses questions se bousculaient dans la tête du dandy alors qu'il enfilait ses vêtements avec la lenteur caractéristique de ceux dont le sommeil n'a pas été reposant. Arriver à retrouver des repères dans le chaos de cette journée qui commençait lui était quasiment impossible car, quelle que soit l'explication un tant soit peu plausible que son cerveau émettait pour comprendre sa situation, il restait toujours trop d'incohérences pour satisfaire Alvin.

Ralliant la cuisine et l'odeur du café une fois qu'il se considéra comme présentable, il eut la surprise de remarquer un sachet de pâtisseries fines trônant sur le plan de travail. Manifestement l'étranger avait pris soin de faire les courses avant de venir, ce qui rappela à Alvin qu'il ne savait même pas quelle heure il était. Estimant rapidement que cela n'avait finalement aucune importance il s'assit lourdement sur le plan de travail avant que son invité involontaire lui tende une tasse de café fumante.

- Merci

Dit-il de façon totalement réflexe, n'ayant pas réellement l'habitude de remercier les étrangers qui lui préparaient le petit déjeuner chez lui le matin. A cela l'homme répondit par une grimace moqueuse, battant l'air devant son visage avec une de ses mains.

- Putain ! Mais c'est quoi cette haleine de cimetière ? Ta faillite était tellement dure que t'as bouffé tes semelles avant de dormir ?

Tout autant surpris par la répartie cinglante de cet homme que par le fait qu'il connaisse son état financier, Alvin eut un mouvement de recul qui eut pour effet de faire cogner son occiput contre une étagère en bois massif derrière lui. Décidément ce n'était pas une bonne journée pour lui il en était sûr et cet accident eut semblait-il pour effet d'allumer une lueur de sympathie dans le regard de son interlocuteur. Preuve d'humanité qui disparut bien vite derrière le regard dur et froid qu'il arborait auparavant. Il se tenait debout face à Alvin, les jambes légèrement arquées et sa tasse de café à la main. Tout chez lui semblait renvoyer au champ lexical de la rudesse et de l'antipathie mais pourtant Alvin croyait discerner, alors qu'il l'observait du coin de l'œil, que cet homme n'avait pas toujours été comme ça. En effet son port de tête et sa façon de se mouvoir de façon extrêmement rythmée, cadencée même, rappelait les démarches de certains officiers des armées navales d'Ashtur. Pourtant l'homme n'avait pas les traits physiques d'un Ashturiani, il n'était pas fin et élancé contrairement à ce peuple de marins. Et surtout son visage n'était pas dépourvu de sourcils et tatoué sur le front, comme il en était coutume pour ce peuple. La veste à franges quand à elle aurait peut être été un indice de l'origine géographique de cet homme si seulement Alvin avait eut un référent à y confronter, ce qui n'était pas le cas.

Alors qu'ils étaient en train de se dévisager, il se remémora les dires de cet homme au sujet de sa faillite. L'information n'avait pas encore filtré des bureaux de sa société lorsque Alvin était parti pour le Chandernagor, ils avaient en effet prévus de préparer une conférence de presse le lendemain. Ainsi donc même les journaux ne pouvaient pas avoir titrés sur cet événement dans la nuit, Galina et le Lewis-Thrond dans son entier n'étaient donc pas encore informés. Donc … Comment ce type qui semblait sorti du fin fond des campagnes profondes de n'importe quel trou perdu pouvait-il savoir qu'il était ruiné ? Quel était son rôle par rapport à toute cette histoire ? On entendait souvent parler de meurtriers et autres criminels de grande envergure qui aimaient revenir sur les lieux du crime une fois leur forfait accompli. Mais malgré ses airs d'associable fini, il ne donnait pas à Alvin l'impression d'avoir grand chose à voir dans cette histoire. Pas nécessairement plus détendu mais de plus en plus intrigué par son vis à vis, Alvin saisit une brioche fourrée à la figue et en avala une bouchée sans entrain avant de briser le silence qui emplissait la pièce.

- Veuillez m'excuser monsieur, mais je n'emploie qu'un seul domestique et même malgré mes difficultés matinales … Je suis certain que votre pilosité est trop abondante et que vous n'avez pas assez de poitrine pour être cette personne.

Un léger sourire en coin se dessina sur le visage de l'étranger qui ne s'attendait manifestement pas à ce que son interlocuteur fasse de l'ironie dans cette situation. Après avoir émis un léger soupir rauque, il répondit d'une voix posée :

- Tu fais allusion à la petite blondinette qui allait voir son patron totalement nu, en train d'émuler un feu de camp dans la baraque ? Eh bien il faudra m'excuser mais j'ai pensé qu'il était plus sage de la congédier, à son âge on a pas besoin de voir des horreurs comme ça. Et de toute façon il fallait limiter le nombre de témoins.

Manifestement Eliane, la domestique avait donc croisé l'homme en venant prendre son poste, il était donc plus de sept heures du matin, c'était certain. Mais au vu de la lumière qui filtrait au travers des vitres, il n'était guère qu'une à deux heures de plus grand maximum. La suite du discours de l'homme et sa propension à parler comme l'adulte mystérieux mais responsable fit naître une pointe de colère dans l'esprit d'Alvin. Prenant tout d'abord une grande inspiration, il se releva et posa sa tasse, se mit à une dizaine de centimètres à peine de son interlocuteur avant de répondre d'une voix dans laquelle se concentrait toute son exaspération et sa colère.

- Sur le principe je vous concède que vous avez bien agi. Mais justement revenons en à cet événement … étonnant. Qu'est-ce qui m'est arrivé ?!

Finit-il par hurler à l'encontre de l'étranger qui semblait vouloir lui répondre avec la même rage à en croire ses sourcils froncés. Mais il fit bien mieux pour calmer le dandy en lui assénant un coup de tête qui claqua sèchement dans l'air, front contre front. Sans préparation préalable ni même une quelconque anticipation de cette réaction violente, Alvin recula en titubant avant de buter contre le plan de travail, totalement abasourdi. La voix éraillée de l'homme suivit, tandis qu'il se massait le front.

- J'y suis allé un peu fort … Mais c'était essentiel pour que tu te calmes car même si ce n'est pas facile pour toi, ce qui est tout à fait compréhensible, c'est nécessaire si tu ne veux pas finir de brûler tout ton appartement. Si je suis là c'est pas pour t'emmerder, mais plutôt pour te sortir du bordel monstrueux dans lequel tu as toujours vécu.

Alvin toucha son nez tout en écoutant l'homme, il savait bien frapper c'était certain car il n'avait touché d'autres zones que celles qu'il visait. La douleur réveilla le souvenir de l'alcool ingurgité la veille, procurant un fort mal de crâne au dandy. D'un ton désabusé, il répondit :

- Ma vie n'était pas monstrueuse avant, mais pour le bordélique … Le nier serait un mensonge trop gros pour moi.
- Je te parle pas de ta vie pauvre nouille, je m'en tape autant que des bagnes de la côte dentelée. Non, si je suis là c'est justement à cause de ce que t'as fait ce matin. Je suis là pour t'apprendre à pas te faire choper et enfermer, gamin.

L'aider ? Drôle de façon d'être pédagogue se dit Alvin en son fort intérieur, préférant ne pas risquer un nouveau coup de poing ou une autre interdiction d'utiliser ses cordes vocales. Et de toute façon, quelque chose d'autre avait bien plus attiré son attention et déclenché sa peur. Dans le même temps l'étranger avait mentionné les prisons les plus effroyables du Lewis-Thrond et le fait qu'il était certainement recherché. Envisager une telle possibilité provoqua un effondrement de toutes ses convictions … En quoi avait-il été assez injuste envers les autres ou tout simple dangereux pour mériter un tel traitement ? Manifestement son angoisse devait se lire sur son visage, car l'homme reprit d'une voix se voulant plus douce :

- Tu dois certainement te demander pourquoi tu es recherché. Tu es perdu en toi même car tu ne vois pas ce que tu à fait pour en prendre autant dans la tronche. J'avoue que perdre sa fortune et toute chance d'avoir un jour une vie normale en moins de quarante huit heures … C'est dur quand même. Mais pour la deuxième perte, je suis passé par là aussi et je vais t'aider à comprendre tout ça.

L'homme dirigea Alvin vers un des fauteuils du salon avant de revenir à la cuisine pour prendre les cafés et les pâtisseries. Le dandy se tenait la tête entre ses mains, totalement anéanti par ce que venait de lui annoncer cet étranger. Les pas de ce dernier se rapprochaient de lui et il finit par l'avoir dans son champ de vision, installant le nécessaire au petit déjeuner entre eux même si Alvin avait maintenant uniquement d'informations. D'une voix accélérée par la tension nerveuse, il lui demanda :

- Mais concrètement, qu'est-ce qu'il m'arrive ?
- Oula … Grande question en réalité qui mériterait des années pour que l'on y réponde correctement. Cependant nous n'avons pas des années devant nous alors …

Il semblait réfléchir pour expliquer au mieux à l'homme traumatisé en face de lui ce qui s'était passé. Ce silence dura une bonne minute qui sembla être une éternité honnêtement longue pour Alvin, tellement préoccupé par toute cette histoire qu'il ne cessait de se repasser dans sa tête les principes déterminants qu'il avait pour le moment retenu de ce que lui avait dit l'étranger. Il était recherché, si il se faisait prendre il finirait dans l'endroit où l'on enfermait les tueurs en série et les violeurs d'enfants. Une boule se formait dans son estomac, lourde comme le plomb elle le forçait à s'affaisser dans le fauteuil en cuir. Son regard était empli par la peur et son esprit ne cessait d'imaginer comment se passait les journées dans les bagnes de la côte dentelée. Perdu dans ses pensées, il fut presque surpris lorsque l'étranger reprit la parole :

-Avant tout, tu dois savoir que ce que je vais te dire va finir de détruire toutes tes certitudes au sujet de ce monde et de ses réalités. La vérité à ton sujet, comme au mien, c'est que nous sommes différents des moutons qui suivent docilement les lois et les codes sociaux. Ca tout le monde peut comprendre qu'instinctivement tu le savais, il suffit de prendre une quelconque gazette pour trouver tes frasques dans les reports des mondanités de la capitale. La vérité gamin, c'est que tout comme moi il y a quelques années, tu as du accomplir un geste symbolique assez fort pour finir par te libérer de l'influence du collectionneur.
- De qui ?
- Le collectionneur, un artefactier extrêmement puissant qui fait tout pour n'être connu de personne et tire les ficelles dans l'ombre. C'est lui qui contrôle le gouvernement du Lewis-Thrond et depuis ce matin … C'est ton ennemi le plus mortel.
- Mais pourquoi moi ? Juste parce que j'ai renoncé à rentrer dans le moule que je m'étais moi-même imposé pour me faire remarquer en société ? C'est totalement incroyable comme histoire voyons réfléchissez monsieur, vous ne pouvez pas affirmer qu'un artefactier a pris le contrôle du gouvernement sans preuves, cela n'a aucun sens !
- Et ta transformation en bûche géante, c'est pas une preuve que quelque chose cloche non ? Non parce que si ca t'arrive souvent, alors je te félicite et en effet j'me serais planté sur ton compte.

La dernière réplique de cet homme sentait l'agacement et au vu de ses précédentes réactions devant les rébellions d'Alvin, ce dernier décida d'arrêter de chercher à poser trop de questions. Son front était encore endolori, il était trop tôt pour penser lui tenir tête. Soupirant lourdement, les sourcils froncés, le dandy reprit :

- Non, en effet. Mais ce que je vous demande, c'est ce que j'ai fait. Concrètement.
- Hem. C'est justement ça le problème en effet. Tu sais comment fonctionne l'art des artefacts ?
- J'en vendais pour l'agriculture avec une de mes sociétés. L'artefactier médite pour tirer de l'inconscient collectif de l'humanité une puissance brute, qu'il nomme l'anima. Elle dispose de toute la puissance d'un concept et est ensuite enchâssée dans un objet. C'est ainsi qu'on use de sceau de feu, qui contienne le concept très répandu de la flammèche. Tout le monde voit ce que c'est et peut l'utiliser pour allumer ses propres feux ou encore ses cigarettes. Même si le prix de ces objets les limitent au final à un usage par les classes les plus aisées.

Pendant l'explication d'Alvin, l'homme s'était levé et approché de la fenêtre, les mains jointes dans le dos. Il semblait regarder la rue en contrebas avec un intérêt certain. Son interlocuteur se demanda si il attendait quelque chose de particulier mais ne lui posa aucune question à ce sujet, pour avancer plus vite dans la compréhension de cette fable qu'on lui servait. Regardant toujours la rue, il répondit d'un ton moqueur :

- Pour l'agriculture ? Vous produisiez quoi, des arrosoirs qui arrosent ? Hem, pardon. Oui donc tu vois ce qu'est un artefact … Eh bien le collectionneur lui a fait bien mieux qu'un simple allume-feu. C'est lui qui a créé un artefact que tout le connaît sans mettre prendre en compte sa puissance, son anima.
- J'ai peur de ne pas bien vous suivre. Il a créé un artefact, ce qui est somme toute normale pour un artefactier. Mais quel est-il ?

L'homme se retourna, l'air particulièrement grave, une tension particulière inonda d'un seul coup la pièce. Le regard de cet étranger se plongeait dans celui d'Alvin avec le sérieux le plus grave, ce dernier était tendu. Il attendait la chute, le verdict.

- Il a créé la constitution de ce pays. Il a créé ces règles sociales pour mieux régner, celles là même que tu as foulées du pied définitivement une dernière fois. Tu as outrepassé l'espace d'un instant la puissance de son artefact. Ce simple instant a suffi pour réveiller quelque chose que le collectionneur recherche, quelque chose dont la quête l'obsède. Ton don de pyrokinésie Alvin.

mercredi 22 décembre 2010

Copinage, quand tu nous tiens ...

Allez, un petit article en plus pour vous présenter le blog d'un ami assez cher (genre au moins deux béhèmes et trois caisses de dom pérignon). Il s'agit de Forge-Rêves, même si ce nom c'est quand même de la merde faut bien le dire. Vous l'aurez compris j'ai du mal à parler de lui en étant objectif, parce que jamais je ne me permettrais d'avouer mon vrai ressenti face à cet homme.

Après son blog c'est autre chose ... Il sait manier une plume le bougre et pas forcément en faisant de gros pavés comme moi. N'hésitez pas à passer par chez lui, il en sera ravi.

De plus nous commencerons bientôt une série de duels d'écriture assez ardus parfois je pense, à savoir écrire des nouvelles au thème imposé. Je lui ais mis le premier pied à l'étrier en lui demandant d'écrire une nouvelle ayant pour héros Alvin et ses chipmunks. Suite à une discussion sur le prénom de mon héros pour le défi de noël (que voulez-vous ... la couverture d'un télé Z m'a inspiré pour le nom ...).

Je vous communiquerais le rendu de son devoir d'écrivain dès qu'il sera disponible, mais allez faire un tour car il sait y faire le bougre. Cette fois-ci, vraiment bonne nuit.

Bises.

Défi de noël, Mardi 21 & Mercredi 22

Oui bon je sais j'avais promis un post par jour mais en même temps je ne sais pas tenir mes promesses lorsqu'il s'agit de ce blog. Voilà la suite du défi de noël, j'espère qu'il vous plaira. Bonne nuit à tous et surtout bonne lecture.

***

Après avoir franchi les persiennes séparant la salle principale du hall d'entrée de cet endroit qui lui donnait la nausée, Alvin tourna court à droite pour rentrer dans les vestiaires. Comme tout lieu de villégiature pour personnes fortunées, le Chandernagor disposait en son sous-sol de courts pour jouer au squash. Ainsi donc les vestiaires étaient-ils constitués de nombreux casiers dont chacun portait le nom d'une famille qui était inscrite au club. Telle était la tradition seul le chef de famille pouvait entrer au nom de son autorité familiale, il venait ici pour la représenter auprès de ses semblables toutes aussi fortunées qu'elle. Seul le chef de famille pouvait décider de quand il léguait son casier à son héritier, sauf cas de force majeure comme un décès prématuré. Alors qu'il ouvrait le sien et prenait son long manteau de laine noire, Alvin contemplait dans une rébellion silencieuse les centaines d'années de tradition qui avaient pétris son actuelle déchéance.

Un fait cependant lui laissa un sourire sans joie … Malgré toute cette éducation basée sur le respect de l'étiquette et son érection en valeur absolue du bon goût des gens civilisés, malgré le fait qu'une telle norme sociale entraine fondamentalement l'établissement de codes et de procédures en tous genres … Eh bien malgré tout cela il semblait bien que personne au club n'ait jamais pensé à définir une procédure pour rendre son casier. Alvin avait bien entendu connu des lignées de marchands ou d'aristocrates qui avaient disparues faute d'héritiers, dans ces cas là le casier était tout simplement démantelé et rangé dans une remise. Tout du moins en attendant qu'une famille de roturiers arrive par maints efforts sur plusieurs générations à se hisser au niveau de prestige nécessaire à l'octroi d'un casier au club. Mais tout cela n'arrangeait pas l'affaire du nouveau pauvre qui se demandait bien si l'on allait le forcer à payer la concession de ce casier à nouveau, chaque année et ce jusqu'à la fin de sa vie. Cette idée ne l'enchantant guère, il se décida à rencontrer les dirigeants du Chandernagor dans le courant de la semaine. Ce soir il n'avait plus la force d'essayer de comprendre le fonctionnement de ce club incestueux, pourri jusqu'aux os, dans lequel les gens n'avaient même pas la décence de prévenir lorsqu'ils lançaient une vendetta à votre encontre.

Las d'occuper son cerveau embrumé par l'alcool avec de pareilles pensées il endossa son manteau et en referma les quatre boucles d'acier gravé qui se trouvaient sur le torse. Avec une nonchalance motivée par la fatigue et l'irrespect génétique qui semblait caractériser les Crawford, il bailla sans le cacher avant de laisser échapper un léger rot. En un certain sens heureusement que personne ne l'ait ni vu ni entendu, cela aurait pu encore contribuer à nourrir l'ire de ses détracteurs et Alvin n'avait plus la moindre envie de leur faire plaisir. Faisant craquer ses phalanges il jeta un œil à la glace fixée sur le verso de la porte du casier et qui lui renvoyait son visage. Un long cou soutenu par des trapèzes solides donnait naissance à une mâchoire carrée, taillée au couteau sur laquelle commençait à poindre une légère barbe. Des lèvres fines au teint rose pâle, légèrement entrouvertes le plus souvent et qui étaient surmontées par un nez long et droit. Ses yeux légèrement en amande abritaient un vert étincelant malgré la fatigue que de profondes cernes avaient gravées dans son visage. Ses sourcils tombaient sous le fait de la fatigue et sa tignasse blond cendré coupée court mais mal coiffée attestait bien de sa déchéance.

Même si son esprit était calme et malgré tout assez serein, son corps montrait sans aucun artifice sa fatigue, son mépris et sa soudaine déchéance. Jamais avant cet après-midi Alvin ne se serait permis de se montrer comme ça. Pour choquer les foules il vaut mieux leur ressembler au plus près, être rasé de près, porter un costume parfaitement coupé, renvoyer l'image du gendre parfait. Avant d'embrasser la demoiselle d'honneur sur l'autel juste après la prononciation des vœux. Repensant à cette farce qu'il avait déjà orchestrée à deux reprises, une fois en tant que témoin et l'autre en tant que marié, il eut à nouveau un sourire légèrement joyeux. Après tout il les avait tous harassés jusqu'au plus haut point, jusqu'à l'affront ultime porté à son propre nom par ceux qui avaient le goût des noms prestigieux. Oui, ils avaient étés poussés à bout par la faute d'un seul homme, dont la seule bêtise et effronterie avait suffit à faire tomber leur système de prestige et de la meilleure façon de le conserver. Car leur réaction à ses multiples facéties n'avaient rien de grandiose, bien au contraire c'était extrêmement lâche même pour le plus tordu des marchands et le plus comploteur des aristocrates. En effet il était mal vu de ne pas finir le travail dans ces dynasties où la parole et l'acte comptent plus que tout.

Alvin laissa son casier encore ouvert en partant, il avait pris son manteau ainsi qu'un range-cigare en cuir plus vide que son portefeuille et un sceau mineur de feu qui servait à allumer lesdits cigares. Dans l'esprit du dynaste déchu persistait l'idée qu'on allait peut être finir le travail. En effet les légendes et l'histoire même du Lewis-Thrond regorgeaient de héros au destin brisé par une cabale de comploteurs qui finissait par ressurgir comme par magie alors que personne ne s'y attendait pour reprendre sa place et châtier ses détracteurs. Le principe même d'ourdir une vengeance machiavélique durant un nombre d'années indéterminé où il disparaîtrait de la circulation pour jeter son dégout à leurs faces une fois qu'ils seraient pris dans ses plans lui parut tentant, alors qu'il empoignait le bronze permettant de quitter le club et de se retrouver dans la rue. Mais une fois gêné par l'obscurité ambiante de l'avenue en cette nuit d'automne, le jeune homme se rappela qu'être dans l'ombre n'avait jamais réussi à être parmi l'éventail de ses compétences.

Il commença à marcher en direction de son appartement du centre-ville, délaissant les fiacres pour ce soir, tout en prenant une grande inspiration. L'air était doux pour l'époque de l'année et une fois que l'on s'était habitué à la seule lueur de la lune, il devenait très agréable de se rendre à foulées mesurées vers sa destination. Sur les trottoirs se promenaient des étudiants déjà assez avinés malgré l'heure peu tardive, surveillés du coin de l'œil par des gardiens de l'ordre à la barbe longue et aux matraques proche de la main directrice. Oubliant l'espace d'un instant ses soucis Alvin se rappela à quel point il avait put apprécier cette capitale du Lewis-Thrond, la grande cité de Galina. Bâtie sur vingt-quatre niveaux différents, immense tour de pierre et d'arbres entremêlés qui pointait haut dans le ciel. Faite de ponts suspendus, d'escaliers aux pierres de granit enchâssées entre de solides branches de chênes plusieurs milliers de fois centenaires.

La légende disait qu'avant Galina se trouvait au niveau de la terre le palais de l'être le plus mauvais que le monde n'ait jamais porté. Peu de personnes connaissaient encore son nom véritable et Alvin lui même le nommait simplement l'artefactier noir. Comme son nom l'indiquait il s'agissait d'un fabricant d'artefacts extrêmement malveillant, dont les principales pensées tout au long de la conception d'un artefact étaient tournées vers le néant le plus absolu. Il ne voulait rien et regrettait la création du monde, il ne désirait qu'une seule chose, le mener à sa propre perte dans une explosion de néant. Mais comme tous les hommes il pouvait parfois faire des erreurs et alors que personne n'était jamais arrivé à le vaincre ou même à démanteler ses créations, l'artefactier noir commit une erreur de calcul qui en lieu et place de son palais dédié au néant naquit une forte source de création qui érigea à partir de la végétation environnante et des pierres du palais maudit une sublime cité aérienne comme il n'en existait nulle part ailleurs dans le monde.

Ainsi se terminait la légende traitant de la création de Galina, tout du moins la version qu'Alvin connaissait le mieux. Car comme toutes légendes l'on pouvait trouver tout et son contraire, mais au delà de la bonne connaissance qu'il avait de cette version, c'était aussi celle qu'il préférait. Accoudé à une balustrade donnant sur un panorama que seul la cité pouvait offrir, il contemplait les centaines de kilomètres de forêts, de villages et de pâtures qui entouraient la tour aux deux éléments, la lance de bois et de pierre. Devant ce paysage qu'il avait appris à aimer durant ces dix dernières années, il se dit qu'en effet cette version de la légende lui plaisait plus que tout car elle célébrait la victoire du tout sur la présence du rien.

Cette phrase assez peu compréhensible prenait pourtant tout son sens dans l'esprit du dandy, alors qu'il rentrait enfin chez lui. Posant son manteau sur un fauteuil du salon il se précipita dans sa chambre en enlevant sa veste et son gilet qu'il jeta sur le sol, entrant dans sa chambre il enleva ses vêtements, ne gardant que son caleçon avant de se jeter sur son lit. Il avait toujours la même idée en tête et même si l'alcool avait aidé à modifier la donne, l'essence même de sa réflexion persistait. Le rien n'était rien, tout pouvait être le tout, ce principe basé sur des antithèses mises face à face pouvait être à la source de n'importe quel retour au succès selon Alvin. Et ce type de pensées positives pourraient peut être lui permettre de sortir des problèmes qui allaient désormais être les siens. Il allait devoir totalement repenser sa façon de vivre désormais, car même si la vente de son patrimoine immobilier personnel lui permettrait certainement de s'assurer une certaine aisance financière, au moins pour quelques temps. Malgré cela l'heure du bilan était quand même venue et Alvin se devait de comprendre comment il en était arrivé là, une autocritique particulièrement acerbe et réaliste lui permettrait certainement de repartir du bon pied. Il ne savait pas exactement quelle somme il allait tirer de la vente de ses possessions, mais cela l'aiderait néanmoins.

Allongé sur son lit Alvin se sentait peu à peu sombrer dans un sommeil qui promettait d'être troublé, c'était toujours dans son repos que ses angoisses ressortaient le plus. Ce moment si particulier où il laissait son inconscient digérer en cauchemars et autres angoisses tout ce qui pouvait lui peser sur le cœur. Tout aussi paradoxal que cela puisse sembler il se réveillait pourtant toujours en pleine forme quelque fut son état la veille. Saoul, fatigué, harassé, drogué, insomniaque … Toujours après cinq ou six heures de sommeil Alvin était totalement reposé et prêt à recommencer une journée sur au plus haut niveau d'énergie dont il était capable. Mais ce soir son esprit cédait face à la fatigue accumulée ces deux derniers jours, aussi brusquement que la mort peut arriver le dandy ferma les yeux et se laissa totalement porter par les vents du sommeil.

Un long, très long couloir était en train de se dessiner sous les pas d'Alvin … Il savait qu'il était en train de rêver, pourtant la structure, la matérialité même de ce rêve avaient tout pour le faire douter de son propre état d'inconscience. Ses pas cadencés suivaient une rigueur militaire qu'il ne s'était jamais su posséder, il arrivait même à sentir le roulement de ses épaules, il se tenait droit, extrêmement droit. Quelque chose reposait sur sa tête, un chapeau certainement, mais cintré au millimètre près sur la forme de son crâne rasé. Jamais il n'avait eu le crâne rasé pourtant … mais c'était obligatoire dans son nouveau travail. Enfin il arriva au bout du couloir et ouvrit la porte qui lui faisait face, une lourde porte blindée, avant de pénétrer dans une pièce aux murs d'un blanc immaculé et où la lumière artificielle agressait les yeux au premier regard. Il fronça les sourcils, le temps de s'habituer à ce changement photonique, distinguant sept personnes assises sur des chaises, la tête baissée. Une fois habitué à la luminosité ambiante Alvin reconnut directement les personnes qui étaient assises devant lui.

Streton, Bobcko, Grants, Walmer, Hecton, Forbze et Tilditch … Les sept personnes dont il avait la certitude qu'ils faisaient partis de la cabale qui avait conduit à sa perte étaient attachés sur des chaises métalliques dans une salle aseptisée. Alvin savait qu'il était là pour les punir mais n'arrvait guère à s'y résoudre. Ils étaient tous en position de faiblesse, incapables de se défendre contre lui. Mais lorsqu'ils relevèrent tous la tête et le regardèrent avec mépris, toujours avec cette même défiance à son encontre, ces regards empreints de haine qu'ils avaient toujours posés sur lui. Même depuis son enfance il n'avait jamais ressenti d'autres sentiments provenant de ces vieillards décatis, régnants en souverains indétronables sur leurs millions et leurs familles. Il ne supportait pas leur simple vue, au fond de lui la colère augmentait, il la sentait bruler dans son corps … Encourager une étincelle qu'il n'avait jamais ressenti en son sein. Oui il était en colère et la première démonstration de cette ire se produisit dans un claquement sec, celui du cartilage nasal de Grants cédant sous le plat de la main gantée d'Alvin.

Rien ne changeait dans le regard des autres dynastes marchands, ils avaient toujours le même air de défi qui trônait sur leurs visages. Alvin ne sentait plus d'autre chose qu'une profonde haine pour ces types et alors que Grants remontait la tête, il vit poindre derrière le nez cassé et l'éclaboussure de sang ce même regard haineux. N'y tenant plus il saisit Grants par les oreilles et propulsa sa tête contre l'arête de son genou, arrachant au vieillard un gargouillis partagé entre surprise et douleur. Déjà Tilditch le regardait avec horreur alors que les autres avaient les yeux braqués vers leur ami mourant, étouffant dans son propre sang. Mais Alvin avait déjà changé de cible et s'acharnait sur Tilditch, usant de ses poings fermés contre les tempes de l'homme, ne laissant aucunes traces immédiatement visibles si ce n'était celles du mince filet de sang qui s'épandait de plus en plus régulièrement par les oreilles de cette victime toute désignée. Les coups tombèrent encore et encore, avec une rythmique et une puissance toujours plus salvatrice pour Alvin. Il détruisait ceux qui l'avait détruit, un juste retour à l'équilibre s'opérait car le rien n'était rien et tout pouvait être le tout. Les forces s'opposaient et se complétaient à la fois, dans la douleur de ces hommes, dans le bruit de leurs os déjà fragiles brisés et dans leurs gémissements de plainte, leurs suppliques … Dans tout cela Alvin se retrouvait pleinement, il voyait sa fougue et son irresponsabilité salvatrice lui revenir, jamais il ne s'était senti aussi vivant que dans ce rêve charmant qu'il était en train de réaliser. Les images se succédaient et se brouillaient dans sa tête, tout devenait flou pour lui dans ce déchainement de violence. Bientôt lui même perdit, à regret, le cours du rêve.

Une odeur forte et une chaleur vive se faisait sentir par toutes les pores de la peau d'Alvin. Mal à l'aise, transpirant, il se retourna dans son grand lit … qui s'effondra dans un vrombissement. Totalement surpris, Alvin ouvrit les yeux et fut stupéfait devant le spectacle qui s'offrait à lui. Sson lit était totalement carbonisé, il reposait sur des braises vives tandis qu'une aura de flammes sortait de son corps. Paniqué, il se redressa et remarqua des gouttes de magma sur sa peau en lieu et place de sa propre sueur. De l'incompréhension et de la peur se mélangeaient dans l'esprit du dandy qui ne put s'empêcher d'émettre un long cri de détresse, dont l'écho ne trouva jamais sa cible car il ne semblait plus capable de parler ou d'émettre n'importe quel son. Se levant précipitamment, il emporta avec lui son aura de flammes rougeoyantes, qui commencèrent ainsi à lécher le plafond. Alors un son sortit de ce drame silencieux, une note de dédain dans cet univers de silence effroyable.

- Tsss … J'en ai connu des pucelles face à leur explosion mais toi … C'est le bouquet.

Une voix rauque, éraillée, inhumaine tellement elle était rugueuse. Alvin se retourna vers l'endroit d'où ses oreilles semblaient avoir perçu le son et put voir un homme tranquillement assis sur un des canapés du salon, près d'une table basse ou trônait une bouteille d'alcool et un cendrier assez rempli. L'homme semblait grand, même assis, il portait ses cheveux roux mi-longs. Son visage était semblable à celui d'un ours tant la barbe mangeait sur le reste de la peau, une écharpe lui couvrait le cou. Massif, bâti comme un coffre-fort, il portait une chemise à carreaux noirs et rouges sur une veste à franges en daim. Un simple jean et de bonnes chaussures de marche, nul besoin de préciser que dans cet intérieur luxueux l'étranger faisait bien pâle figure. Finissant son verre avant de parler, il le posa et éteignit une cigarette avant de couper court aux questions d'Alvin :

- Bon … On a une bonne et une mauvaise nouvelle dans ton malheur. La mauvaise c'est que j'ai du sceller tes cordes vocales pour que tu n'ameutes pas tout le monde. La bonne … c'est que tu as ce que tu voulais, tu es enfin libéré de ce monde de merde. Rhabille toi avant que je te viole maintenant.